Commission - Sources bibliques et theologiques

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L’entreprise est-elle une communauté ou une société ?

25 juin 2022 Repères chrétiens
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Est-elle d’abord un groupe des hommes et des femmes vivant une aventure commune ou une organisation de personnes liées par des contrats ? Il serait tentant mais vain d’opposer ces deux conceptions. En effet, une entreprise est tout cela à la fois : une communauté, une société de personnes, une société de capitaux.

Réussir l’articulation de ces différentes dimensions est nécessaire à la réussite de l’entreprise. C’est aussi une source de tension. En effet, deux évidences semblent s’opposer(202) :

  • L’expérience quotidienne du dirigeant qui vit avec, rencontre, se soucie de ses équipes. Expérience également des collaborateurs qui se sentent tous liés entre eux par quelque chose qui les dépasse.
  • Le sentiment de propriété qui anime le dirigeant qui a investi dans son entreprise et en vit tous les risques… Sentiment confirmé par la réalité juridique qui lui permet de vendre son entreprise.


Remarquons que cette tension trouve sa solution dans la vision de la propriété portée par la Pensée Sociale Chrétienne : le bon usage de ce que l’on possède et la mise au service des autres de ce que l’on possède (203). Revenons sur le fait que l’entreprise est une communauté (204) : Dans Centesimus Annus, saint Jean-Paul II écrit :
« Le but de l’entreprise n’est pas uniquement la production du profit, mais l’existence même de l’entreprise comme communauté de personnes qui, de différentes manières, recherchent la satisfaction de leurs besoins fondamentaux et qui constituent un groupe particulier au service de la société tout entière. » (205)


Cette vision de l’entreprise est en cohérence avec ce qui fait la richesse des entreprises : « Aujourd’hui, le facteur décisif est de plus en plus l’homme lui-même, c’est-à-dire sa capacité de connaissance qui apparaît dans le savoir
scientifique, sa capacité d’organisation solidaire et sa capacité de saisir et de satisfaire les besoins des autres. »206


De fait, une entreprise qui fonctionne à toutes les caractéristiques d’une communauté (207).

Caractéristiques qui peuvent être aussi celles d’une société et dont la compréhension peut aider à créer les conditions de la solidarité dans l’entreprise :

  • La poursuite d’une finalité : chacun est présent pour
    contribuer ensemble à une création. Dans l’entreprise elle
    est formalisée dans sa raison d’être, sa mission ou sa vision. La communauté vit d’autant mieux que chacun des
    membres « contribue au geste créateur » ;
  • Des ressources et des moyens partagés ;
  • Des règles de vie qui permettent à chacun de se situer, de savoir comment agir et de trouver une solution en cas de conflit208. Ces règles rendent possible la libération de l’énergie de tous au service des objectifs de l’entreprise. Elles peuvent (et doivent) évoluer dans le temps au gré des situations rencontrées ;
  • Des relations de coopération entre les collaborateurs.
    L’accumulation d’expériences partagées au service d’un projet rend ce dernier commun. La multiplication des interactions respectant les règles de vie développe des habitudes communes. Peu à peu émerge une identité qui dépasse largement l’ensemble des intérêts individuels et collectifs ;
  • Une relative stabilité de chacune de ces caractéristiques. Lorsque dans certaines situations, l’une d’elle est fragilisée ou disparaît, le sentiment de communauté se défait.

Remarquons, qu’une entreprise dont le fonctionnement correspond à ces cinq caractéristiques a de forte chance d’être aussi une entreprise performante. Faire vivre l’entreprise comme communauté, c’est donc lui donner de la vitalité et la rendre performante209. Ce qui est surprenant, ce n’est pas que l’entreprise soit une communauté, c’est plutôt de constater que pendant longtemps la doxa économique a accepté qu’elle ne le soit pas.

 

202 Est-ce une énième version de l'opposition entre l’individualisme et le collectivisme ? Et/ou celle entre le capital
et le travail ?

203 Une autre façon de voir est de considérer qu’il existe plusieurs natures de propriétés de l’entreprise.
204 Sur le sujet, voire la fiche rédigée par la commission repère des EDC : https://www.lesedc.org/actu/fiche-pointde-reperes-lentreprise-communaute/. Lire également « Penser l'entreprise comme communauté : fondements,
définition et implications » Dominique Bessire et Hervé Mesure, Management & Avenir 2009/10 (n° 30).
205 Centesimus Annus, §35.
206 Centesimus Annus, §32.
207 « Ensemble de personnes unies par des liens d'intérêts, des habitudes communes, des opinions ou des
caractères communs » (Cf. Larousse).
208 Cf. l’importance des règles dans les communautés bénédictines. Un extrait de la règle est lu et commenté
chaque jour.
209 La façon de faire a été largement développée dans Développer la coopération dans l’entreprise page 81. Mais aussi dans les différents livrets des EDC : Bien commun et l’entreprise, La participation dans l’entreprise et L’entreprise et la destination universelle des biens.




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